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La Symphonie du Verseau

La Symphonie du Verseau

Informations :

Date : Jan 15, 1964
Auteur : Marguerite Darbellay
Publication : Journal Le Havre

Contenu :

« La Symphonie du Verseau »   de Max Pinchard

« Il y a très longtemps que je désirais composer une symphonie pour cordes », nous déclare l’auteur.

Avant  le grand concert  du 15 janvier qui doit apporter la révélation d’une seconde symphonie de Max Pinchard, nous nous sommes entretenus avec l’auteur, essayant de pénétrer par avance dans l’esprit de cette œuvre importante qui portera le titre de « Symphonie du Verseau ».

            « Il y a très longtemps que je désirais composer une symphonie pour cordes, nous dit notre sympathique concitoyen, avant même d’avoir écrit ma Symphonie pour orchestre. Mais la symphonie pour cordes qui se prive, en quelque sorte, de la multitude des couleurs orchestrales doit, pour ne pas trahir l’instrument, lui donner l’occasion d’aller jusqu’au bout de ses possibilités et lui faire exprimer toute la gamme épanouie des nuances qui lui sont propres ».

-Pourquoi la « Symphonie du Verseau » ?

Max Pinchard ne serait pas disciple de Georges Migot s’il n’avait ce sens des correspondances mystiques des symboles qui traversent les âges chargés d’un message spirituel. Le « Verseau », l’un des signes du Zodiaque qui inspira aussi Georges Migot, est pour Max Pinchard une force d’espérance. Sa symphonie pour cordes apparait donc, dans cet éclairage comme une ardente  méditation, s’acheminant vers une aurore lumineuse, celle vers laquelle  tendent les âmes fraternelles éprises d’un idéal exigeant.

            Si l’on aborde cette parenté certaine avec le grand ainé, une distinction s’impose bientôt. Entre les deux musiciens existent des points communs avant tout d’essence spirituelle. C’est le climat dans lequel évolue la pensée de Georges Migot qui conquit  dès le début le disciple  et le confirma dans la voie qu’il voulait sienne d’une honnêteté totale envers la musique, se fondant sur la nécessité d’une ascèse spirituelle comme facteur de création.

            Mais il reste que sur le plan de l’écriture chacun d’eux suit sa propre inclination utilisant des moyens d’expression différents, encore que les recherches de G. Migot sur « le libre devenir » de la phrase musicale, sur tout ce que suggèrent  d’inexprimable les lointaines harmoniques n’ont pas été sans enrichir les travaux personnels de Max Pinchard.

            La « Symphonie du Verseau »,  dont les musiciens havrais préparent actuellement la toute première audition, comporte quatre mouvements. Disons toute de suite qu’il s’agit d’une œuvre de musique pure, ni descriptive, ni pittoresque, mais qui cherche à traduire par son climat quelque chose de l’appel humain vers l’Espérance.

Dans le Prélude se développe une arabesque aux harmonies étudiées, créant une atmosphère intense qui se détend sur un choral souple. Le second mouvement est une danse. Son caractère rythmé s’impose dès l’entrée, mais un rythme qui brise constamment  les symétries où le thème de la danse s’efface un moment pour faire place à un élément de rêve un peu voluptueux avant  de s’épanouir. En exergue du Lamento du troisième mouvement, qui est le cœur de la symphonie, deux vers de Gérard Murail : « Dans la lumière qui nous ment, aimer par signes… Et recoudre la plaie au fil de nos sourires » donnent la signification profonde de l’effort humain pour se dégager de sa pesanteur. Une grande place est laissée aux soli d’instruments  qui, tour à tour, expriment une voix dans la foule, voix à laquelle un choral donne, après un silence, la réponse apaisante de l’amour.

Enfin le finale, traité dans une sorte de pulsation rythmique où se glissent des phrases chantantes qui contrastent  et éclairent l’horizon. Une coda vigoureuse clôt abruptement l’œuvre.

Cette seconde Symphonie de Max Pinchard, qui suscitera sans doute chez beaucoup le désir de réentendre la « Première Symphonie » de caractère plus dramatique, sera jouée à Marseille par l’orchestre à cordes de cette ville,  peu de temps après Le Havre.

Au Havre, sous la direction de M. Pierre Desseigné, la création de la « Symphonie du Verseau » sera insérée dans un programme fort bien composé : « Toccata, bourrée et gigue » de Scarlatti ; Symphonie n° 31 en ré, dite « la Parisienne », de Mozart et la Sérénade pour cordes en ut majeur de Tchaïkovski.

Prolongeant l’élan donné par les Semaines d’Art de novembre, souhaitons que la saison musicale qu’inaugure ce premier concert du 15 janvier connaisse de la part du public la même faveur que connurent les manifestations de novembre ;

            Cet effort de nos musiciens  locaux de développer ainsi sur plusieurs mois l’attrait qu’ont suscité, dès l’origine, les Semaines d’Art ; doit rencontrer une égale volonté de soutien de la part des Havrais, qui, somme toute, n’auront dans l’avenir que l’orchestre qu’ils sauront mériter.

MD.  

 



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